Les prix sont restés stables cette semaine pour le blé et le maïs, mais l’orge s’affaisse encore. Hausse puis baisse pour le colza français alors que le soja repart en baisse.
Les prix sont restés stables cette semaine pour le blé et le maïs, mais l’orge s’affaisse encore. Hausse puis baisse pour le colza français alors que le soja repart en baisse.
Retour de la concurrence russe en blé
Au 10 novembre, les exportations européennes étaient déjà bien engagées, en hausse de 56 % pour le total de l’Union européenne, stables au départ de la France, par rapport à l’an dernier. Après une période de forte demande adressée aux blés européens, le marché se trouve désormais dans une nouvelle phase.
Les prix ont arrêté de grimper au départ de la France et de l’Union européenne suite à la stabilisation des prix en mer Noire. La concurrence reste rude et les blés français ne sont pas hors course : au contraire, en prix Fob (prix de départ sur un bateau dans le port), ils étaient parmi les moins chers des blés offerts à l’Égypte cette semaine.
Néanmoins, cela n’a pas suffi : une fois les coûts de transport pris en compte, ce sont les blés russes et ukrainiens qui l’ont emporté, l’Égypte ayant acheté hier 120 000 tonnes de blé ukrainien et 345 000 tonnes de blé russe pour chargement début janvier. Du côté russe, les exportations sont en retard par rapport à l’an dernier et les opérateurs ont donc lâché du lest.
Les prix européens, sans grand changement sur la semaine à 174,75 €/t rendu Rouen en base juillet, n’ont pas été les seuls à réagir à la stabilisation des prix russes : les blés américains perdent cette semaine entre 1 et 3 $/t selon leur qualité et les cotations du marché à terme de Chicago sont en baisse depuis plusieurs jours.
Contrairement à ce qui se passe généralement en début de campagne, les prix russes n’ont pas joué le rôle de rouleau compresseur en raison du niveau élevé du rouble par rapport au dollar et d’une rétention pratiquée par les producteurs. La question se pose donc de savoir s’ils vont se mettre à jouer ce rôle maintenant et tout pousser vers le bas. Cela apparaît peu probable aujourd’hui en raison de stocks nettement plus bas cette année en Russie.
Semis de blé en retard à l’ouest de l’Union européenne
Dans l’actualité de la semaine, FranceAgriMer entérine dans son bilan une bonne perspective d’exportation vers pays tiers pour les blés français (12 millions de tonnes). Avec de bonnes performances aussi vers l’Union européenne et une consommation animale accrue par rapport à l’an dernier. Ce qui conduit à des stocks prévus à 2,5 millions de tonnes fin juin 2020, soit le même niveau que 2019 malgré la très forte remontée de la production cette année.
Rien n’est joué en revanche pour la récolte 2020 avec des semis encore très en retard : en France 72 % des semis de blés étaient réalisées au 11 novembre contre 92 % l’an dernier à la même date. Cela risque d’entraîner une petite baisse des surfaces semées, que nous prévoyons à - 1 % actuellement mais qui pourrait s’amplifier.
Ce n’est pas en France que le retard est le plus marqué : c’est au Royaume-Uni, avec une réalisation de moins de 60 % des intentions de semis (80 % normalement à cette date). Les semis sont en retard aussi aux États-Unis à cause des excès d’humidité également. En Europe de l’Est, ils sont terminés mais la situation est trop sèche, en Bulgarie notamment. La situation est assez sèche aussi en Ukraine et en Russie mais rien d’alarmant : les semis sont terminés en Russie et les surfaces de blé d’hiver y sont en forte hausse… De quoi modérer sans doute l’optimisme pour les prix de la prochaine récolte 2020.
Regain de compétitivité en orge
Si les prix du blé se sont stabilisés, ceux de l’orge poursuivent leur baisse et perdent encore entre 2 et 4 €/t cette semaine, à 159,5 €/t rendu Rouen (base juillet). À cause d’une chute parallèle de l’euro face au dollar, les prix s’affaissent de manière plus marquée en dollar, à 183 $/t Fob Rouen (-6 $/t).
Cette chute des prix est tout à fait en ligne avec un bilan lourd et la perspective de gros stocks dans l’Union européenne et en France en fin de campagne. On peut penser qu’elle va permettre aux orges françaises de trouver un peu de demande à l’exportation et ce pourrait être le cas dans le cadre du nouvel appel d’offres que vient de lancer la SAGO, l’organisme d’achat étatique de l’Arabie Saoudite, pour 1 million de tonnes.
Les orges françaises se retrouvent maintenant moins chères que leurs concurrentes de la mer Noire. Sur le front chinois, pas de nouvelles affaires à rapporter cette semaine, mais la décision de la Chine de prolonger de six mois l’enquête antidumping que ce pays a lancée à l’encontre des orges australiennes. Cela signifie, comme on le prévoyait déjà, que la Chine aura encore des orges européennes avant la fin de la campagne.
Peu de mouvement en maïs
Peu de changement pour les prix du maïs en France cette semaine : + 0,5 €/t à La Pallice à 163 €/t et - 1 €/t Fob Rhin à 164 €/t (base juillet). L’USDA, dans son rapport de vendredi dernier, a revu en baisse son estimation de la récolte américaine, mais la correction est restée minime : -3 millions de tonnes à 347 millions de tonnes par rapport à 366 millions de tonnes en 2018.
Ce mouvement, ainsi qu’une petite révision en baisse des stocks américains de maïs pour la fin de campagne en septembre 2020, a d’abord fait grimper les prix américains le 8 novembre, mais la hausse est restée éphémère. Les prix américains affichent une baisse sur la semaine, à 174 $/t Fob Gulf (- 1 $/t). Ils demeurent sous la pression brésilienne enclenchée depuis l’été et sous la pression des maïs ukrainiens qui arrivent massivement sur le marché (- 3 $/t à 164 $/t Fob).
Néanmoins, il nous semble d’une part que la récolte américaine de maïs reste surestimée par l’USDA. Notre estimation est de 340 millions de tonnes. Par ailleurs, les stocks mondiaux de maïs, bien que demeurant importants, vont diminuer cette campagne. La décision de la Chine, cette semaine, d’autoriser à nouveau les importations de viande de volaille américaine est un facteur plutôt haussier pour la consommation de maïs aux États-Unis. L’ensemble de ces éléments conduit à constater que les prix du maïs sont déjà bas sur le marché mondial et ne devraient pas descendre beaucoup plus.
Le colza français tiraillé entre l’huile de palme et le soja
Les prix du colza français ont atteint lundi dernier leurs plus hauts niveaux depuis mai 2017 : 396 €/t rendu Rouen et 399 €/t en fob Moselle. Les cours ont été principalement soutenus par la hausse du prix de l’huile de palme. En effet, selon le dernier rapport du MPOB, Bureau malaisien de l’huile de palme, les stocks malaisiens de cette huile sont en baisse de 2 % environ entre septembre et octobre, en conséquence d’une baisse de la production et d’une hausse des exportations.
Les prix de colza sont élevés depuis le début de la campagne avec la mauvaise récolte européenne et les perspectives d’une bonne demande en huile du secteur biodiesel (hausse des obligations d’incorporation des biocarburants dans la majorité des pays européens). En milieu de semaine, les cotations de colza ont commencé à reculer dans le sillage du soja américain.
Sur une semaine, le prix recule de 3 €/t en rendu Rouen à 389,5 €/t, mais progresse légèrement en fob Moselle (+ 0,5 €/t à 395,50 €/t) et sur Euronext (+ 1,5 €/t à 389,25 €/t).
Au Canada, le prix du canola, tout comme le colza français, a suivi l’évolution des cours mondiaux d’huile de palme et de soja, terminant la semaine sur une stabilité à Winnipeg en dollar canadien, mais sur un recul en dollar américain (- 2 $/t à 348 $/t sur les contrats de janvier), résultat d’un nouveau recul de la monnaie canadienne.
Le soja repart à la baisse
Le conflit commercial entre les États-Unis et la Chine a de nouveau pesé sur les prix du soja américain. Alors que les opérateurs du marché s’attendaient à la conclusion d’un premier accord partiel, les discussions se sont de nouveau tendues entre les deux pays. Le président américain a d’abord déclaré aux journalistes qu’un accord commercial avec la Chine n’inclurait pas une suppression complète des droits de douane.
Les deux pays s’étaient pourtant auparavant engagés pour une levée « par étape » de tous les droits de douane en cas d’accord. Puis le président Trump a récemment affirmé que les droits de douane américains sur les produits chinois seraient « augmentés de manière très substantielle », si aucune trêve n’était conclue avec les responsables chinois.
D’autre part, le dernier rapport de l’USDA sur l’avancement de la récolte montre une bonne progression des moissons. Au 10 novembre, 85 % de la surface de soja aux États-Unis a été coupée. Le retard pris par rapport à l’année dernière est ainsi presque rattrapé (87 % récoltés à la même date en 2018). Notons que le rapport de l’USDA sur les ventes hebdomadaires des produits agricoles publié aujourd’hui indique des exportations de soja à 1,25 Mt pour la semaine se terminant le 7 novembre, soit une baisse de 31 % par rapport à la semaine précédente.
Dans ce contexte baissier, le prix de soja à Chicago a cédé 8 $/t depuis vendredi dernier.
Le tourteau de soja a suivi la fève et recule d’environ 3 $/t à 334 $/t sur le CBOT. En revanche, en France, il gagne 4 €/t à Montoir (à 333 €/t) dans le sillage du tourteau brésilien. Le prix du pois fourrager est, lui, resté stable sur une semaine à 196 €/t.
Le tournesol de la mer Noire en hausse
Le prix du tournesol mer Noire est en hausse de 7,5 $/t à 337,5 $/t sur la semaine. Cette hausse s’explique par une bonne demande à l’exportation notamment à destination de la Bulgarie où la rétention des producteurs obligent les industriels à avoir recours à l’importation. En France, les prix sont stables à 330 €/t à Saint-Nazaire. Ils ont néanmoins monté en début de semaine dans le sillage du colza et des huiles, mais sont redescendus ensuite, suivant la baisse du soja.
À suivre : fin des semis d’hiver en Europe et aux États-Unis, politique de ventes des opérateurs russes en blé, résultats de l’appel d’offres de l’Arabie en orge, négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine, récolte de maïs et de soja aux États-Unis.